Laurent Aubague
laubague@yahoo.fr
 

La fuente del mundo


Al parecer del ombligo, el universo no es visible. Es apenas oloroso. El ombligo, que es la nariz interna de los vientres, espera los baños de madrugada para respirar hondamente el perfume de las estrellas, siempre diligentes para alimentar las ilusiones olfativas. El ombligo enraíza efectivamente los astros en el cuerpo de los hombres. Y éstos mojan allí sus ganas de humedad. Privados de agua por tantos desiertos estelares, aprecian el pequeño pozo de los abdómenes que les abre el paso hacia el refrescamiento del sudor y de la sangre. El ombligo es pues la boca nutritiva del cielo. Es el alimento olvidado que puede llenar la panza de las nubes. Y poco importa si se quemó desde el primer día de su vida. Afortunadamente, su aire de cráter apagado lo salva. Recuerda que las desavenencias de la corteza terrestre se hacen visibles sobre todo a flor de piel. Y cuando a un dedo hurgador se le ocurre penetrar en el ombligo para asegurarse que ningún magma se esconde allí, él se siente honrado. Se toma incluso por la fuente del Génesis. Pero, ¡ a la Biblia no se la equivoca de medio en medio! El ombligo era demasiado minúsculo para que se pensara en él desde el primer día de la creación. Y desde entonces, no para de protestar contra las camisas que le ocultan la superficie de la tierra. A pesar de sus gritos para ser definitivamente reconocido como el único ojo asimétrico, poca gente le concede la ventaja de haber participado el primero al espectáculo del mundo. Su discreción le es, después de todo, perjudicial. Visionario, por cierto, se dejó encandilar del mismo modo que de su boca se confiscaron los apetitos primordiales. El castigo del ombligo es pues ser reducido a un papel de hermafrodito de confesionario. A mitad del camino entre las tripas y la mirada, es suficientemente ambivalente para que se le perdone cualquier forma de pecado. Retraído tras el velo de las telas, está condenado a vivir como un tuerto exiliado para siempre de la luz. Y de noche, cuando las miradas se apagan, es seguramente el único que se queda mirando de hito en hito la oscuridad. En las tinieblas, le da la réplica al ojo de Dios.



 
La Source du Monde


Au regard du nombril, l’univers n’est pas visible. Il est tout juste odorant. Le nombril, qui est le nez rentré des ventres, attend les bains de minuit pour respirer à pleines narines le parfum des étoiles, toujours empressées d’entretenir les illusions olfactives. Le nombril les enracine effectivement dans le corps des hommes. Elles trempent là leur envie d’humidité. Assoiffées par tant de déserts stellaires, elles apprécient le petit puits des abdomens qui leur ouvre le passage vers le rafraîchissement de la sueur et du sang. Le nombril est donc la bouche nourricière du ciel. Il est l’aliment oublié qui peut remplir la panse des nuages. Et tant pis s’il est cuit dès le premier jour de la vie. Heureusement, son air de cratère éteint le sauve. Il rappelle que les déboires de la croûte terrestre sont surtout visibles à fleur de peau. Et quand un doigt fouineur s’avise de pénétrer dans le nombril pour s’assurer qu’aucun magma ne s’y cache, ce dernier se sent honoré. Il se prend même pour la source de la Genèse. Mais la Bible, elle, ne s’est pas fourrée le doigt dans l’oeil. Le nombril était vraiment trop minuscule pour qu’on y pense au tout premier jour de la Création. Et depuis, il n’arrête pas de protester contre les liquettes qui l’occultent de la surface de la terre. Malgré ses cris pour être définitivement reconnu comme le seul oeil asymétrique, peu lui concède l’avantage d’avoir participé le premier, au spectacle du monde. Sa discrétion lui est au fond préjudiciable. Visionnaire certes, il a été passablement aveuglé, tout autant que de sa bouche ont été confisqués les appétits primordiaux. Le châtiment du nombril est donc d’être réduit au rôle d’un hermaphrodite de confessionnal. A mi-chemin des tripes et du regard, il est suffisamment ambivalent pour que toute forme de péché lui soit plus ou moins pardonnée. Reclus derrière le voile des étoffes, il est condamné à vivre comme un borgne à jamais banni de la lumière. Et la nuit, quand les regards s’éteignent, il est certainement le seul qui reste à dévisager l’obscurité. Et dans les ténèbres, il donne la réplique à l’oeil de Dieu.


Laurent Aubague. Doctorado en estudios latinoamericanos (1980), Montpellier III, Francia. Es Maitre de conferences en la Universidad Rennes 2, en Rennes, Bretagne, Francia desde 1992. Sus trabajos incluyen varias publicaciones sobre cultura popular y sociolingüística.


Regreso a la página de Argos 15/ Poesía